A closer look at the pornography of existence

Saturday, April 21, 2007

Embarré en d'dans

Je pétitionne sauvagement pour faire déclarer illégale toute activité professionnelle par un si beau jour. Samedi, midi 48. J'ai dormi quatre petites heures cette nuit et je sens que je vais le payer ce soir. Je suis arrivé au bureau en vélo après une magnifique balade sur le bitume de Sherbrooke St. avec le vent dans la face et des mini-jupes plein les yeux. Le soleil tape fort dans les baies vitrées de mon huitième étage et les femmes avec qui je travaille, désoeuvrées, parlent fort - comme d'habitude. Je voudrais être partout ailleurs sauf ici. Donnez-moi un bout de ferme du Delaware ou une plage du Maine, n'importe quoi ! J'irais bien me péter la face dans les vagues froides de Gaspé ou boire une Corona sur la terrasse d'un café trop cher de Baie Saint-Paul.



Je ne sais pas quel genre de structure de support ont utilisé les ingénieurs qui ont bâti l'immeuble dans lequel je travaille, mais je sais que certaines agentes de voyage mangent probablement trop de pâtes et / ou de patates. Elles marchent d'un bout à l'autre du bureau et le sol tremble. Amplitude inconnue, mais c'est du sérieux !

C'est presque tragique de ne pas pouvoir profiter de ces premières belles journées. Je me console en me disant qu'il y a des petits enfants qui meurent de faim partout dans le monde, ou des vieux garçons qui n'ont jamais exploré ce qui se dissimule sous les jupes de mesdemoiselles. Et je me console en me disant que ce soir, je m'en vais voir la belle Maus au De Lima avec le Drunk Rocker, qu'on va en virer une tabarnak, et conduire nos vélos complètement intoxiqués jusqu'au Mile End Bar pour aller serrer la pince de Bender et entendre le beau rouquin Marinelli.

Et demain, je ne m'en souviendrai probablement pas.

*

Depuis BRINGING OUT THE DEAD (1999), Scorcese n'avait pas torché un film que j'aie envie de voir. Quand j'ai rencontré Barbara Bouchet en 2000 à Tarrytown (NY), dans le cadre de CultCon 2000, elle revenait de deux semaines de tournage sur le plateau de GANGS OF NEW YORK, et même cette légère coïncidence ne m'a pas donné le goût de le visionner. Di Caprio, pas mon favori, et couplé à l'aspect "film historique" avec des gars en pantalons accordéon et des bérêts sales, c'était le summum du "pas envie d'voir ça". [J'allais rencontrer, en août 2003, une jolie demoiselle répondant au doux nom de Sara Bouchet, mais elle n'avait malheureusement aucun lien de parenté avec Barbara. Elle était toutefois assez délicieuse et je regrette amèrement qu'elle ait tout fait pour ne pas rester en contact avec moi.]



En 2004, le p'tit grisonnant aux sourcils noirs sortait THE AVIATOR, une autre fresque historique avec Di Caprio. Je répète ? Pas. Envie. D'le voir.



2006. Scorcese sort un "remake" de INFERNAL AFFAIRS, un film de Hong Kong réalisé par Lau Wai Keung et Mak Siu Fai en 2002. THE DEPARTED a tout pour réussir : une belle bande-annonce, et surtout... un casting en BÉTON armé. Les producteurs ont probablement dû cracher le pognon en toussant tellement ça leur faisait mal aux bourses : Jack Nicholson (qui, avec sa drôle de coupe de cheveux, parvient presque à nous faire oublier le monstre sacré qu'il est), Leonardo Di Caprio (encore ! mais bon...), Matt Damon (toujours aussi fouine et détestable, on se demande ce que les filles peuvent lui trouver), Mark Wahlberg (hilarant), Martin Sheen, Alec Baldwin, Ray Winstone et la troublante Vera Farmiga (dont le regard me rappelle étrangement une ancienne fréquentation pharmacologue, mais on gardera cette histoire pour une autre fois si vous le voulez bien).



Outre les joueurs, on a un scénario en béton, actualisation suprêmement habile de celui de 2002, trempé dans la bonne sauce Scorcese - chansons rock fétiches des années '70, technique typique avec plan séquences et narration, personnages déjantés, dialogues finement ciselés - et relocalisation de Hong Kong à Boston. Peu ou pas d'asiatiques en vue, des irlandais homophobes et racistes, et une trame narrative qui crée immanquablement une immense tension chez le spectateur. Vous vous doutez probablement de quoi il retourne : un personnage de truand est "undercover" dans la police de Boston, et un policier a infiltré les mafieux. Et tous les deux jouent à savoir qui démasquera qui le premier.



Nicholson est diabolique; il faut le voir avec sa gueule de maniaque, en robe de chambre, la tête enveloppée dans un nuage de cocaïne, dire à une nana aux gros canons : "You want some coke ? There it is. Don't move till you're numb".



THE DEPARTED est une observation acidulée de la petite pègre de Boston, et des relations souvent incestueuses que ses membres entretiennent avec la loi. Ce sont des personnages jouissifs qui se croisent et s'entrechoquent, quitte à en produire des flamèches. C'est surtout le meilleur film de Scorcese depuis GOODFELLAS en '90, et il n'est guère surprenant qu'il ait râflé tous ces Oscars.

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En 1959 sortait sur les écrans français A DOUBLE TOUR, le troisième film de Claude Chabrol, et son premier thriller psychologique. Un film pas aussi touffu que tous ceux qui allaient suivre, mais certes fascinant, et magistralement réussi. Le récit est conçu de façon à ce qu'il n'y ait pas vraiment de personnage principal, mais un portrait variable de la bourgeoisie vinicole d'une famille d'Aix-en-Provence. Famille composée du père Henri (Jacques Dacqmine), de sa femme Thérèse (Madeleine Robinson, courageuse), et de leurs deux enfants Richard (André Jocelyn, énigmatique) et la jolie Élisabeth (Jeanne Valérie). Élisabeth fréquente un demi-voyou irresponsable, fort en gueule et constamment saoul (un Jean-Paul Belmondo pré-A BOUT DE SOUFFLE, extrêmement jeune, et surtout impayable) et Henri trompe sa femme avec sa voisine, la belle Léda (Antonella Lualdi). Veille sur ce bel ensemble la bonne Julie, interprétée par une Bernadette Lafont jeune et sensuelle, dont la scène d'ouverture du film fait l'élégie.





Je vous épargnerai les détails de l'intrigue en vous disant qu'elle vaut largement la peine que vous la découvriez vous-même. Sachez toutefois que, outre l'habile étude psychologique, on remarque ici des plans de caméra finement travaillés et ambitieux, et un montage pas toujours linéaire qui y va de quelques astuces - retours en arrière, superpositions, élipses.



On voit ici apparaître pour une des premières fois un rôle de policier atypique, formule sans cesse renouvellée qui deviendra une marque de commerce de Chabrol dans pratiquement tous ses autres films. 1959 se retrouve figée dans le temps, avec la plastique impeccable des actrices de Chabrol le jouisseur, et le vignoble enchanteur dans lequel se déroule l'intrigue nous donne envie d'aller voir si nous y sommes.

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